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La taxe Caïman élargie

Christelle Wils - Senior Estate Planner
Comme chaque année, la loi-programme de l’année dernière (du 22 décembre 2023) a apporté différentes modifications sur le plan fiscal. Elle a entre autres une nouvelle fois renforcé ce qu’on appelle la taxe Caïman. Quelles sont ces modifications et que peuvent-elles impliquer pour vous ? Christelle Wils, Senior Estate Planner, vous donne quelques explications.

La « taxe Caïman », c’est quoi ?

La taxe Caïman est un ensemble de dispositions qui sont entrées en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2015. Le but à l’origine était de lutter contre « les patrimoines flottants », c’est-à-dire les patrimoines détenus au travers de structures dites « off-shore », qui ne sont pas imposées ou qui sont considérées comme faiblement imposées. Par exemple, des trusts ou sociétés établies dans des « paradis fiscaux ».

Elle a depuis été étendue à plusieurs reprises. Elle a notamment fait l’objet d’une modification en profondeur en 2017/ 2018 et son champ d’application vient encore d’être élargi à la fin de l’année dernière. La majorité des dispositions adoptées à cette occasion, sont entrées en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2024.

Quel est le résultat de ces différentes modifications ? Le système s’est-il amélioré ? Est-il plus cohérent ?

Le régime qui en résulte est devenu encore plus complexe qu’il ne l’était déjà au début. En outre, il a, à ce jour, un champ d’application très large qui concerne, au fur et à mesure des modifications successives, bien d’autres structures que les seules structures établies dans des « paradis fiscaux » à l’égard desquelles le législateur avait annoncé vouloir lutter en 2015.

Quelles structures par exemple ?

A côté des trusts, sociétés et fondations visées depuis le début, une société telle que la Soparfi, qui est une simple société holding de droit luxembourgeois, est susceptible, depuis 2018, de tomber dans le champ d’application de la taxe à certaines conditions.

À la suite de la modification de l’année dernière, la question peut désormais également se poser au sujet de la société civile immobilière de droit français. Or, cette société, loin d’être « exotique », est couramment utilisée pour détenir un ou plusieurs biens immobiliers en France.

Un autre véhicule patrimonial auquel il est habituellement fait recours, non pour des raisons fiscales, mais pour conserver le contrôle est susceptible d’être visé. Il s’agit de la fondation de droit néerlandais, la « Stichting Administratie Kantoor » ou « STAK ».

Comment fonctionne cette taxe ?

  • D’abord, la taxe frappe par transparence les revenus perçus par certaines structures, appelées « constructions juridiques », dans le chef des « fondateurs » de celles-ci comme s’ils les avaient perçus directement, c’est-à-dire, conformément aux règles applicables à l’impôt des personnes physiques.
Donc, pour l’application du régime de taxation par transparence, on fait comme si la structure n’existait pas et comme si le « fondateur » avait perçu directement les revenus de la « construction juridique ».
  • Au régime de transparence s’ajoute une imposition des revenus distribués par la construction juridique au-delà patrimoine apporté au taux de 30 %.
Pour éviter cette double imposition, la loi prévoit la possibilité d’exonérer les distributions effectuées par une construction juridique dans la mesure où il est démontré que celles-ci sont constituées de revenus qui ont déjà subi leur régime d'imposition en Belgique.

Il y a aussi une obligation de déclaration de la construction juridique dans sa déclaration fiscale à défaut de quoi une amende de 6.250 € peut être appliquée par année et par construction juridique non déclarée.

Quelles sont les grandes mesures de renforcement apportées à ce régime l’année dernière ?

  • En très résumé, une mesure importante concerne les plus-values sur titres réalisées par une construction juridique, par exemple une Soparfi qui tomberait par hypothèse dans le champ d’application de la taxe. Jusqu’ici, de telles plus-values pouvaient, conformément aux règles applicables à l’impôt des personnes physiques, être exonérées par transparence au moment où elles étaient réalisées par la Soparfi. En application du régime en place, elles pouvaient également être exonérées au moment où elles étaient ensuite distribuées aux actionnaires. Ce n’est désormais plus le cas : elles peuvent être exonérées par transparence mais elles deviennent imposables au moment où elles sont distribuées au taux de 30 %.
  • Il y aussi “l’exit tax” qui implique une fiction de distribution et donc une taxation au taux de 30 % des bénéfices non distribués par la construction juridique à certaines occasions, par exemple lorsque le fondateur déménage à l’étranger.
  • Enfin, l’obligation déclarative a été étendue. Il faut notamment détailler dans une annexe à la déclaration fiscale les revenus recueillis et distribués par la construction juridique au cours de la période imposable et indiquer le montant du patrimoine de la construction juridique à la fin de la période imposable ainsi que la partie du patrimoine qui a été apportée par le fondateur. Cette mesure, à la différence des autres, est entrée en vigueur au 1ᵉ janvier 2023, donc pour la déclaration fiscale à rentrer en juin/juillet de cette année.
En réalité, le régime est très complexe. N’hésitez pas à demander de plus amples explications au département Estate Planning.
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