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Saut de génération : comment favoriser vos petits-enfants ?

Par Ariane Joris - Head of Estate Planning
Il est de plus en plus fréquent que les enfants reçoivent une donation ou un héritage de leurs parents à un âge de plus en plus avancé. Les enfants ont généralement, à ce moment-là, déjà constitué leur propre patrimoine et n’ont plus nécessairement besoin de cette donation ou de cet héritage. Les petits-enfants, quant à eux, commencent leur propre parcours de vie lorsque leurs grands-parents décident d’effectuer une donation ou lorsqu’ils viennent à décéder. Dès lors, un coup de pouce de la part des grands-parents est le bienvenu afin que les petits-enfants puissent acheter leur première habitation ou encore développer un projet professionnel,… Face à ce constat, le législateur a pris des mesures afin d’encourager le ‘saut de génération’.
Ce mécanisme permet que tout ou partie du patrimoine des grands-parents revienne aux petits-enfants par le biais d’une donation ou d’un héritage, et non, comme d’habitude, aux enfants. Un tel saut de génération peut être réalisé de différentes manières : soit par le grand-parent lui-même soit par ses enfants. Dans certains cas, les grands-parents attribueront une partie de leur patrimoine directement aux petits-enfants, et dans d’autres cas, les enfants décideront de la part qui reviendra aux petits-enfants.

Législation et possibilités

Nous allons vous présenter les possibilités qu’offre la loi pour réaliser un tel saut de génération ainsi que les conséquences fiscales en termes des droits de donation et de succession. Notez que les conséquences fiscales d’un saut de génération peuvent différer d’une région à l’autre. La résidence fiscale du donateur ou du défunt au cours des cinq années précédant la donation ou le décès détermine la région compétente pour percevoir les droits de donation ou de succession. Si le donateur ou le défunt a résidé dans différentes régions au cours des cinq ans précédant la donation ou le décès, les droits de donation ou de succession seront dus dans la région où il a résidé le plus longtemps durant cette période.
Cet article traite des différentes possibilités qui s’offrent à vous, en tant que grand-parent, pour gratifier vos petits-enfants, à savoir la donation et le testament. Lorsqu’ un grand-parent réalise une donation à son petit-enfant, son enfant (le parent du petit-enfant) peut intervenir afin que cette donation soit imputée sur sa part dans la succession du grand-parent. Ainsi, l’égalité entre vos enfants est respectée, même si vos enfants n’ont pas le même nombre de descendants.
Nous allons également aborder les donations occasionnelles que vous pouvez réaliser pour un montant limité à votre petit-enfant comme cadeau d’anniversaire, de Noël ou de fin d’année.
Dans un prochain article, nous examinerons les possibilités qui s’offrent aux enfants de ne pas recevoir tout ou partie du patrimoine des grands-parents mais de les transmettre à leurs propres enfants (les petits-enfants). Nous aborderons successivement, d’une part, le saut de génération total pour lequel la décision appartient à votre enfant et, d’autre part, le saut de génération partiel au terme duquel une partie de votre patrimoine reviendra à vos petits-enfants suite à une donation réalisée par vos enfants (parents des petits-enfants).
Une attention particulière doit être apportée à la situation où des petits-enfants mineurs reçoivent une partie du patrimoine de leurs (grands-)parents. Tant qu’ils sont mineurs, les parents gèrent les biens des enfants. Lorsque les petits-enfants atteignent l’âge de la majorité (18 ans), ils acquièrent le plein pouvoir de disposer de leurs biens.

Testament ou donation

En tant que grand-parent, vous pouvez rédiger un testament en faveur de vos petits-enfants ou procéder à une donation en leur faveur de votre vivant. Vous pouvez disposer librement de la moitié de votre patrimoine indépendamment du nombre d’enfants que vous avez. Vous pouvez donc attribuer cette quotité disponible à vos petits-enfants.
D’un point de vue fiscal, il est avantageux de gratifier vos petits-enfants, même lors de votre décès par le biais d’un testament. Dans les trois régions, les droits de succession en ligne directe sont calculés par héritier et selon des taux d’imposition progressifs. Plus il y a d’héritiers, plus la moyenne d’’imposition sur la succession est faible.
Exemple :
Un grand-père (veuf) vient à décéder en laissant un enfant (qui a lui-même trois enfants) et des avoirs mobiliers pour un montant de € 600.000,00. Son enfant unique hérite de l’ensemble de ses avoirs conformément à la dévolution légale. Vous trouverez, ci-dessous, un aperçu des droits de succession que l’enfant doit payer en fonction de la région (la région dans laquelle le défunt a résidé le plus longtemps au cours des cinq années précédant son décès percevra les droits de succession) :
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Si le grand-père rédige un testament dans lequel il partage son patrimoine entre son enfant et ses trois petits-enfants, laissant à chacun de ses petits-enfants € 100.000,00 (et € 300.000,00 à son enfant), les droits de succession s’élèvent comme suit
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En répartissant par voie testamentaire votre patrimoine entre votre enfant et vos petits-enfants, vous payez :
  • € 61.125,00 de droits de succession en moins en Région wallonne ;
  • € 61.500,00 de droits de succession en moins en Région de Bruxelles-Capitale ;
  • € 63.000,00 de droits de succession en moins en Région flamande ;
contrairement à la situation où la totalité de votre patrimoine revient exclusivement à votre enfant unique.
Veuillez noter qu’en Région flamande, si vous souhaitez léguer à vos petits-enfants une partie limitée de votre patrimoine, aucun droit de succession n’est dû si l’héritage que reçoit chaque petit-enfant est inférieur ou égal à € 12.500,00.
Il est important de savoir quelle part de votre patrimoine vous pouvez donner à vos petits-enfants. Si vous souhaitez favoriser vos petits-enfants par le biais d’une donation d’une partie de votre patrimoine ou par le biais d’un testament, dans ce cas de figure, vous les privez, dès lors, d’une part dans votre patrimoine. Il est donc préférable de tenir compte de la ‘réserve’ qui revient, en principe, à vos enfants. La réserve de vos enfants détermine jusqu’à quel point vous pouvez déshériter vos enfants sans qu’ils puissent s’y opposer. En Belgique, la loi garantit aux enfants et au conjoint survivant un minimum successoral, à savoir la part réservataire (appelée la « réserve »). La réserve est la part minimale de votre patrimoine, majorée des donations effectuées de votre vivant, à laquelle les héritiers réservataires ont droit. Si vous avez des héritiers réservataires, vous ne pouvez en principe disposer librement que d’une partie limitée de votre patrimoine, appelée la quotité disponible. La quotité disponible correspond à la moitié de votre patrimoine quel que soit le nombre d’enfants que vous avez.
Vous pouvez rédiger vous-même votre testament (écrit entièrement de votre main, daté et signé) ou le faire établir par un notaire.

Donation ou pacte successoral avec saut de génération

Cela peut être parfois une question délicate lorsque vous, en tant que grand-parent, souhaitez attribuer un même montant ou des biens de la même valeur à chacun de vos petits-enfants par le biais d’une donation alors que vos enfants n’ont pas le même nombre d’enfants. Par conséquent, les différentes branches de la famille (un enfant et ses enfants) recevraient des valeurs différentes. Cela peut amener à des discussions sur la question de savoir si la part réservataire de vos enfants est atteinte. En effet, en gratifiant vos petits-enfants, la réserve de vos enfants pourrait avoir été atteinte et ceux-ci pourraient dès lors demander que les donations soient réduites à votre décès en tant que (grand)-parent.
Une possibilité intéressante afin d’éviter une telle situation est le mécanisme dit du "rapport pour autrui". Par cette technique, vous, en tant que grand-parent, faites une donation de votre vivant directement à votre petit-enfant. La donation en faveur de ce dernier sera, à votre décès, imputée sur la part que votre enfant (le parent de votre petit-enfant) recevra dans votre succession. Afin d’assurer l’égalité entre vos enfants dans le cadre de votre succession, les donations réalisées en faveur des enfants de vos enfants seront prises en compte.
Lorsque votre enfant (le parent du petit-enfant) décède par la suite, il conviendra également de vérifier que tous les enfants du défunt ont été traités de manière égalitaire. Dans la succession de votre enfant, les donations réalisées au profit d’un ou plusieurs de vos petits-enfants seront également prises en compte afin de respecter l’égalité entre les petits-enfants.
En pratique, cette donation sera traitée comme si deux donations avaient eu lieu : d’abord une donation à votre enfant suivie immédiatement d’une donation à votre petit-enfant par ce dernier pour le même montant. Ces deux donations sont considérées faites en avance d’hoirie et il conviendra d’en tenir compte lors de la détermination de la part successorale revenant à chaque (petit)-enfant.
Afin de mettre en œuvre ce mécanisme, une convention est nécessaire entre vous, en tant que grand-parent, votre enfant et votre petit-enfant. Cette convention est établie dans l’acte de donation ou dans un acte ultérieur. Cette convention est considérée comme un pacte successoral ponctuel, étant un accord successoral portant sur une partie déterminée de votre succession. Afin de conclure une telle convention, une procédure spéciale doit être suivie auprès d’un notaire.
L’administration fiscale flamande a d’ores et déjà pris position concernant le traitement fiscal de ces donations. En pratique, cela signifie (comme mentionné ci-dessus) qu’il y a en fait deux donations des mêmes biens : une donation directe du grand-parent à son petit-enfant et une deuxième donation du parent à son enfant. Seule la donation du grand-parent au petit-enfant est soumise aux droits de donation.
Un pacte successoral ne doit pas nécessairement se limiter à cette seule donation. Un pacte successoral peut également être conclu pour toutes les donations que vous avez déjà effectuées en tant que grand-parent. Dans ce cas, il s’agit d’un pacte successoral global qui, comme mentionné ci-dessus, est supervisé par un notaire et suit une procédure stricte. Dans le cas d’un pacte successoral global, les parents, avec leurs héritiers en ligne directe, recherchent ensemble un équilibre entre les enfants et les petits-enfants et un accord global sur le traitement des donations ultérieures ainsi que sur les avantages reçus par les enfants. Comme avantages perçus par les enfants, on pense par exemple au fait que vous, en tant que grand-parent, vous vous êtes occupés des petits-enfants pendant de nombreuses années et que vos enfants n’ont pas dû payer de frais de crèche ou de garderie. Cet équilibre est subjectif : les avantages et les donations ne doivent pas se compenser de manière mathématique. Les parties doivent s’accorder sur ce qu’ils considèrent être ‘équilibré’.

Donation occasionnelle – cadeau occasionnel

Vous pouvez donner une somme d’argent à vos petits-enfants à différentes occasions, par exemple pour leur anniversaire ou comme cadeau de nouvel an.
Ces cadeaux occasionnels ne sont pas considérés comme des donations mais comme des cadeaux dans la mesure où ils sont raisonnables par rapport au patrimoine de la personne qui donne. Il n’existe pas de règle fixe pour faire la distinction entre un ‘cadeau’ et une ‘vraie donation’. Pour que cela soit considéré comme un cadeau occasionnel, il faut que le montant relatif (le montant donné par rapport à l’ensemble du patrimoine de la personne qui donne) et le montant nominal (le montant effectivement donné) du cadeau occasionnel ne soient pas trop élevés.
Puisqu’un cadeau occasionnel n’est pas considéré comme une ‘vraie donation’, il ne sera pas imputé sur la quotité disponible de la succession de la personne qui a donné. Les parents ou le juge de paix ne devront pas intervenir pour accepter le cadeau occasionnel.
Les liquidités que vous donnez à vos petits-enfants à titre de cadeau occasionnel sortent de votre patrimoine et ne sont pas soumis à des droits de succession à votre décès.

Conclusion

En tant que grand-parent, vous pouvez donner un coup de pouce financier à vos petits-enfants en les désignant dans votre testament ou en réalisant une donation de votre vivant d’une partie de votre patrimoine en leur faveur. Par le biais d’un tel saut de génération, vos biens appartiennent en tout ou en partie à vos petits-enfants et non à vos enfants (comme c’est le cas habituellement). En effet, le législateur a prévu cette possibilité.
Cette technique de planification (saut de génération) permet également une diminution des droits de succession.
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¹ En région flamande, on utilise le terme ‘impôt de donation’ tandis qu’en Région de Bruxelles-Capitale et Région wallonne on utilise le terme ‘droit de donation’. Dans cet article, nous utilisons toujours le terme ‘droit de donation’ pour les trois régions, sans distinction.
² Pour de plus amples informations au sujet des donations, consultez également notre brochure ‘Donations’.
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