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Le pacte successoral : évitez les conflits familiaux lors d’un décès

Ariane Joris - Head of Estate Planning
Vous souhaitez éviter des conflits entre vos héritiers au moment de votre décès ? Un pacte successoral peut vous offrir la possibilité de régler à l'avance certains aspects de votre succession. Tout pacte successoral est contraignant, de sorte qu'au décès, il n’est pas possible de revenir sur les accords précédemment conclus. L’accord conclu dans le pacte doit donc résulter d’un choix mûrement réfléchi ; il offre par la même occasion aux membres d’une famille un forum pour communiquer clairement entre eux et éviter toute confusion ou discussion ultérieure.

En 2018, la réforme du droit successoral est entrée en vigueur en Belgique. Une nouveauté majeure de cette réforme est la nouvelle possibilité d’établir des pactes successoraux. De quoi s’agit-il ?

Un pacte successoral est une convention qui a pour objet d’organiser à l’avance la succession (ou certains aspects de la succession) future d’une personne.
  • Jusqu’en 2018, il n’était pas possible de conclure, au sein d’une famille, une convention afin de fixer du vivant des parents les modalités de leur succession.
  • Depuis 2018, les parents et leurs enfants disposent d’une plus grande marge de manœuvre pour conclure, du vivant des parents, un accord sur la future succession du ou des parents. Attention néanmoins, tout n’est pas possible ! Le principe reste celui de l’interdiction de conclure des pactes successoraux. Toutefois, la loi les autorise dorénavant dans certains cas. Dans la grande majorité des cas, il s’agit de s’accorder sur des donations réalisées par les parents par le passé ou encore, certains aspects relatifs à ces donations.

Est-il exact qu’il existe différents types de pactes successoraux ?

Oui. On distingue généralement les pactes successoraux globaux (ou familiaux) des pactes successoraux dits « ponctuels ».

Le pacte successoral global est celui qui regroupe les deux parents - ou l’un d’eux - et tous les enfants. Le terme « global » signifie donc que le pacte doit réunir le ou les parents et tous les enfants. Cela signifie que si un seul des enfants concernés refuse de signer le pacte, il ne sera pas possible de conclure valablement un pacte successoral global.

Dans ce cas, l’objet du pacte est de faire le point sur ce que chaque enfant a déjà reçu précédemment (ou recevra dans le cadre du pacte lui-même) et de constater l’existence d’un équilibre entre chacun enfant.

Pourriez-vous nous donner un exemple concret de pacte successoral global ?

Des parents ont deux enfants, un fils et une fille. Après ses études, le fils a occupé gratuitement un appartement de ses parents durant deux ans. La fille, de son côté, a reçu de ses parents la somme de 15 000 € pour acheter une voiture. En l’espèce, tant les parents que les enfants considèrent que les enfants ont été traités financièrement de la même manière.

Au décès du ou des parents, la loi prévoit de tenir compte des donations que les enfants ont reçues du vivant de leur parent. Si la donation a été consentie en tant qu’« avance sur héritage », l’enfant qui a été gratifié doit « rapporter » la valeur de la donation dans la succession afin de rétablir l’égalité entre les deux enfants lors du décès du parent donateur. Dans cette perspective d’égalité entre les enfants, la loi prévoit uniquement de tenir compte des donations au sens strict du terme (exemple : donation bancaire, donation notariée, …) et non, des avantages dont certains enfants ont pu bénéficier. L’on pense en l’espèce à l’occupation gratuite de l’appartement par le fils.

Cela signifie que, dans notre exemple, la fille devra par hypothèse rapporter la donation de 15.000 € dans la succession alors que l’avantage financier dont le fils aura bénéficié en occupant gratuitement l’appartement ne sera, en principe, pas pris en compte. La fille recevra, par conséquent, 15 000 € de moins que son frère à cette occasion.

Pour éviter ces discussions, il peut être opportun de conclure un pacte successoral global. Avec un tel accord, il est possible, du vivant des parents, de mettre un point final à ces discussions de sorte que ni la donation ni l’avantage résultant de l’occupation gratuite de l’appartement ne soient pris en compte dans le cadre de la succession des parents.

Qu’en est-il des pactes successoraux ponctuels ?

Outre la conclusion de pactes globaux, la loi prévoit également la possibilité de conclure des accords spécifiques concernant certains aspects d’une donation ou d’une future succession. Il s’agit alors de pactes successoraux ponctuels. Par hypothèse, ce type de pacte concernera une opération précise et ne requiert pas l’intervention de tous les membres d’une famille.

Pourriez-vous nous donner un exemple de pacte ponctuel ?

Un père a trois enfants. Il souhaite faire donation des actions de son entreprise à ses deux filles, toutes deux travaillant dans l'entreprise familiale. Il a également un fils qui ne travaille pas dans l'entreprise. Comme il souhaite traiter ses trois enfants de manière égale, il fait donation à ses filles des actions de l'entreprise familiale en stipulant que la donation à chaque fille est en avance sur son héritage. Au décès du père, la donation des actions sera donc prise en compte pour déterminer, lors du partage de la succession, la part respective de chaque enfant et maintenir l’égalité entre les trois enfants au décès.

La donation ayant été réalisée avec réserve d’usufruit, on tiendra en principe compte de la valeur des actions au décès du donateur pour rétablir l’équilibre entre les trois enfants.

Le père craint toutefois que la donation entraîne des tensions entre ses trois enfants dans la mesure où la valeur des actions pourrait augmenter entre le moment de la donation et son décès. Il voudrait, par conséquent, éviter que la plus-value prise par les actions - attribuable aux efforts de ses deux filles - soit prise en compte à son décès lors de la répartition de la succession entre ses trois enfants. Dans ce cas, il est recommandé de conclure un pacte successoral ponctuel par lequel les membres de la famille s’accordent pour quela valeur des actions – dont on tiendra compte pour déterminer la part de chacun dans la succession du père – sera celle au jour de la donation et non, au moment de son décès.

Y a-t-il une procédure particulière à respecter ?

Conclure un pacte successoral constitue un acte important qui peut avoir un impact considérable sur les patrimoines des héritiers. La nouvelle loi instaure donc une procédure et des formalités strictes à respecter. À défaut de respecter ce cadre obligatoire, le pacte successoral ne sera pas valide. La loi a ainsi rendu obligatoire l’intervention du notaire dans l’établissement de pactes successoraux ainsi que le respect de délais formels et d’une procédure relativement stricte.

Le rôle du notaire est dans ce cadre crucial. Il est par ailleurs important de contacter votre notaire à temps.

En guise d’exemple, dans le cadre d’un remariage, au sein duquel un des époux a un ou plusieurs enfant(s) issu(s) d'une précédente relation, les époux peuvent par contrat de mariage supprimer (ou réduire) le droit d’usufruit dont le conjoint survivant hérite normalement si rien n’est prévu. Il s’agit d’un pacte Valkeniers.

Ce pacte est considéré comme un pacte successoral et doit donc respecter le formalisme prévu par la loi. Il doit donc au minimum être prévu 1 mois et demi avant la date du mariage.

Il est donc important de se rendre à temps chez le notaire lorsque l’on veut prévoir une telle disposition dans le contrat de mariage.
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