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La taxe de solidarité. Un retour de la taxe sur les comptes-titres ?

Ariane Joris - Head of Estate Planning
L’accord de gouvernement « Vivaldi » l’avait annoncé : une contribution des personnes « qui ont les épaules les plus larges » sera demandée.
Ce 2 novembre, le Conseil des ministres a approuvé en seconde lecture un avant-projet de loi visant à introduire une nouvelle « taxe annuelle sur les comptes-titres ». Le texte sera prochainement soumis à l’avis du Conseil d’Etat, avant d’être présenté au vote parlementaire. Un avis officiel annonçant cette nouvelle taxe annuelle a été publié au Moniteur Belge du 4 novembre 2020.

Ce nouvel impôt « indirect » se veut « simple et efficient ». Sera-t-il pour autant exempt de difficultés ?

Quelle est l'assiette de la taxe?

La taxe frappera tous instruments financiers (a) détenus sur comptes titres (b), dont la valeur moyenne (c) excède un million d’euros au cours d’une période de référence (d).

a. Qu’entend-on par « instruments financiers » ?

La définition est très large, puisqu’il s’agira de tous les actifs financiers inscrits sur un compte-titres (en ce compris les produits dérivés comme les turbos, speeders et trackers).

Il semblerait que les liquidités sur compte à vue et sur compte-épargne resteront, à ce stade, en dehors de cette définition.

Les titres nominatifs, qui par nature ne sont pas inscrits en compte-titres, ne seront pas visés par la taxe.

b. Quels comptes-titres seront visés ?

Tous les comptes-titres, dont la valeur moyenne excède un million d’euros, qui sont détenus par des personnes physiques, des personnes morales (comme les ASBL et les sociétés) ou encore les fondateurs de constructions juridiques seront soumis à la taxe.

Les comptes-titres ouverts par les intermédiaires financiers pour leur propre compte ne seront pas visés par l’impôt.
Tel n’est pas le cas par exemple des compagnies d’assurance, qui détiennent les comptes-titres pour le compte des preneurs d’assurance. Ces comptes-titres – des assurances de la branche 23 – subiront l’impôt.

c. Comment sera calculée la valeur moyenne du compte-titres ?

Le compte-titres sera valorisé le dernier jour de chaque trimestre civil. Cette valorisation constitue un point de référence. Une moyenne est établie entre l’ensemble des points de référence d’une période de référence.

Le seuil du million d’euros sera atteint lorsqu’au cours de la période de référence, la moyenne des valeurs comptabilisées à chaque point de référence est supérieure à un million d’euros.

Le calcul du seuil sera donc établi par compte-titres, indépendamment du nombre de titulaires du compte-titres ou de son démembrement.

d. Quelle sera la période de référence ?

Il s’agira d’une période de douze mois consécutifs, s’étalant du 1er octobre au 30 septembre.

La première période imposable débutera le jour qui suit la publication de la loi au Moniteur belge et prendra fin le 30 septembre 2021. Dès lors, si la loi devait être adoptée avant la fin de l’année civile, la valeur des comptes titres au 31 décembre 2020 sera prise en compte pour le calcul de la taxe.

Si le compte-titres est clôturé au cours de la période de référence, celle-ci prendra fin au jour de la clôture.

Comment la taxe est-elle calculee ?

Le taux de la taxe sera fixé à 0,15 %. Il sera appliqué sur l’ensemble du compte-titres, dès lors que sa valeur moyenne au cours de la période de référence excède un million d’euros.

Par exemple, pour un compte-titres dont la valeur moyenne s’élève à 1.250.000 €, la taxe sera égale à 1.875 €.

Qui est redevable de la taxe ?

Lorsque le compte-titres est ouvert dans les livres d’une institution financière belge, cette dernière sera responsable de la retenue, de la déclaration et du paiement de la taxe pour le compte de l’ensemble du (des) titulaire(s) du compte-titres.

S’agissant des comptes-titres situés à l’étranger, soit l’institution étrangère effectuera les démarches pour le compte du contribuable, soit le contribuable devra lui-même procéder à la déclaration du compte-titres et au paiement de l’impôt.

Dans l’hypothèse où un compte-titres a plusieurs titulaires, ceux-ci seront solidairement tenus à la déclaration et au paiement de l’impôt.

A quoi peut-on s'attendre en cas de tentative d'evitement de cette taxe ?

L’avant-projet de loi instaure une disposition « anti-abus », dont le but est de décourager toute opération visant à contourner cette taxe sur les compte-titres.

Plusieurs situations pourraient être qualifiées d’abusives :
  • La scission d’un compte-titres en plusieurs compte-titres, ou l’ouverture de plusieurs comptes-titres (éventuellement auprès de plusieurs institutions financières) dans le but d’abaisser la valeur individuelle de chaque compte-titres sous le seuil du million d’euros.
  • La conversion d’actions, obligations ou autres instruments financiers en titres nominatifs afin d’échapper à la taxe.
Si l’administration qualifie une opération d’abusive, le contribuable pourra toujours établir la preuve qu’il poursuivait d’autres objectifs que l’obtention d’un avantage fiscal dans la réalisation de cette opération. Il ne sera alors plus question d’abus fiscal.

Il est important de noter que l’entrée en vigueur de cette mesure « anti-abus » est fixée à la date du 30 octobre 2020. Il s’agit de la date à laquelle le public a pu prendre connaissance pour la première fois, par l’intermédiaire des médias, de la nouvelle taxe. Cette date a été confirmée dans l’avis publié au Moniteur Belge.

Conclusion

L’avenir nous dira si cette taxe sur les comptes-titres est aussi simple et efficace qu’elle y parait.

Cette nouvelle taxe appellera encore de nombreux commentaires, car elle suscite plusieurs interrogations.

Il semble toutefois clair que la volonté du législateur est d’élargir au maximum le champ d’application de la taxe, tout en empêchant dès aujourd’hui le contribuable de réorganiser son patrimoine pour échapper à ce nouvel impôt.
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