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Immobilier coté : quand durabilité rime avec rentabilité

Florent Griffon - Responsible Investment Specialist
La demande de plus en plus forte des investisseurs pour des stratégies d’immobilier durable encourage les entreprises à s’aligner sur les exigences de durabilité.
Historiquement, les stratégies d’investissement immobilier et l’investissement durable ne semblaient pas aller bien ensemble. Les approches traditionnelles de développement durable étaient mal adaptées aux spécificités du secteur immobilier, et les investisseurs étaient confrontés à un manque d’information « ESG » (pour Environnementale Social et de Gouvernance) vis-à-vis des entreprises du secteur. L’offre de stratégies immobilières durables restait donc limitée. Pourtant, depuis quelques années, les sociétés foncières ont commencé à développer leur reporting extra-financier. Cela améliore la disponibilité des données ESG. Ce reporting facilite aussi le travail des investisseurs ESG en rendant plus aisée la mise en place de stratégies d’investissement durables en immobilier coté. De cette façon, un cercle vertueux s’établit progressivement. 

La pression de l’Europe

Même si des efforts importants sont déjà déployés par de nombreuses sociétés foncières, le secteur immobilier devrait connaître des changements plus importants dans un proche avenir. En Europe, les réglementations sur l’efficacité énergétique des bâtiments deviennent déjà beaucoup plus strictes. On citera par exemple la directive relative à l’efficacité énergétique des bâtiments (refonte de la directive 2010/31/UE sur la performance énergétique des bâtiments) qui exige que tous les nouveaux bâtiments de l’UE soient quasiment « zéro énergie » d’ici la fin de l’année. 
Et c’est loin d’être suffisant. Les bâtiments représentent actuellement environ 40 % des émissions anthropiques de gaz à effet de serre. Dans un scénario « business as usual », et suivant les tendances démographiques et économiques mondiales, les émissions de gaz à effet de serre des bâtiments pourraient doubler ou tripler d’ici 2050. Or, pour parvenir à une croissance de la température inférieure à 2 degrés dans le monde, le secteur du bâtiment doit réduire ses émissions mondiales de 85 % d’ici 2060 par rapport aux niveaux actuels. L’Union européenne suit actuellement une tendance de -30%. Les autres régions du monde sont à la traîne. Cela montre que le rythme actuel des efforts est clairement insuffisant pour atténuer l’impact futur du changement climatique. Par conséquent et de toute évidence, il existe donc une forte probabilité d’intervention gouvernementale résolue. 
Un nouveau renforcement des normes d’efficacité énergétique des bâtiments est également attendu en Europe et au-delà. Il se matérialise d’ores et déjà avec le « European Green Deal » et le package « fit for 55 » annoncé par la Commission Européenne cet été, qui vise une réduction de 55 % des émissions carbones de l’UE d’ici 2030, et qui fera entrer le secteur immobilier dans le système des quotas carbone (en Anglais « ETS – Emissions Trading System ») et devrait renchérir les énergies fossiles. Ce train de mesures va donc encore davantage accélérer la transition vers des bâtiments bas-carbone.

Triplement des efforts

A l’échelle de l’Union européenne, c’est plus qu’un triplement du taux actuel de rénovation énergétique des bâtiments qui est nécessaire pour atteindre les objectifs carbones de l’Union européenne en 2050. Par conséquent, le secteur immobilier européen dans son ensemble est confronté à un défi très important. Les sociétés foncières devront consentir à des investissements importants, même seulement pour assurer la continuité des activités.

Et si rien n’est fait ?

Le secteur immobilier devra évoluer à un rythme forcé. C’est une opportunité pour les acteurs les plus avancés sur la voie de la transition énergétique. A l’inverse, les entreprises qui prennent du retard et dont les bâtiments présentent une performance énergétique insuffisante, prennent le risque d’une dégradation de la valeur de leurs actifs, voire le risque « d’actifs échoués » (« stranded assets »). En effet, les réglementations futures pourraient simplement interdire la location de bâtiments peu économes en énergie. Ainsi, les aspects ESG sont appelés à devenir très importants. Les entreprises qui ont le mieux anticipé ces tendances de développement durable seront les gagnantes de demain et constituent les opportunités d’investissement d’aujourd’hui. 

Social et gouvernance

Clairement, la lutte contre le changement climatique demeure le moteur principal de l’évolution du secteur immobilier vers plus de durabilité. Cela dit, les approches de durabilité recouvrent également des aspects Sociaux ou de Gouvernance.
  • Sur le pilier Social : le degré de satisfaction des locataires, les taux d’occupation des bâtiments, l’existence de litiges (ce que l’on appelle des « controverses ») avec des locataires ou non, la relation aux communautés locales et l’intégration des bâtiments d’un point de vue urbanistique, la problématique de la sécurité sur les chantiers pour les développeurs 
  • En matière de gouvernance : le degré de protection des actionnaires minoritaires offert par les statuts de l’entreprise, la transparence et les mécanismes de lutte contre la corruption, la relation aux autorités publiques locales, etc. 
En passant en revue ces critères, l’investisseur durable s’assure que l’entreprise fonctionne de manière harmonieuse avec les parties prenantes qui constituent son environnement opérationnel, qu’elle préservera sa « licence to operate » c’est-à-dire son droit et sa capacité à poursuivre son exploitation, et donc que son modèle de développement est viable.

En conclusion

Au total, nous produisons une analyse holistique du profil des entreprises, à la fois sur les aspects financiers et ESG, et ce faisant, nous identifions les acteurs les mieux préparés pour le monde de demain. Nous sommes convaincus que, très certainement, l’avenir de l’immobilier coté sera durable.
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