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Isabelle de Borchgrave

"Africa inside me": Isabelle de Borchgrave, la reine du papier

Art Advisory Team - Art Advisory Manager
Dans le cadre de l'exposition 'Africa inside me' d'Isabelle de Borchgrave à Luxembourg, nous avons rencontré cette artiste  qui réinvente le papier avec une grâce poétique.
Hubert d’Ursel : Isabelle de Borchgrave, vous êtes sans conteste la reine des oeuvres en papier ! Comment expliquez-vous cet engouement pour cette matière ?

Isabelle de Borchgrave : Le papier est le premier média quand on décide de dessiner quelque chose.

Le papier enlève la peur : si on échoue, il suffit de le chiffonner et de recommencer.

Selon la manière dont on le traite, dont on le plie, le papier se transforme. C’est un support formidable et accessible à tous !

Il y a 30 ans, j’ai commencé une collection de robes en papier. C’est dans les musées que j’ai trouvé mon inspiration, quand je regardais tous ces costumes, on n’arrivait pas à bien voir. La manière dont les artistes peintres reproduisaient les textiles dans les tableaux m’a toujours fort intéressée. J’ai voulu reproduire les robes comme on ne les avait jamais vues ! C’est parti d’une curiosité, j’ai commencé à faire des robes pour les ranger secrètement.

Un jour, des Américains sont arrivés, ils ont vu mon travail, et leur réaction fut immédiate : ne vendez jamais vos robes, exposez-les plutôt dans un musée ! Je fus surprise. Depuis lors, mes robes en papier ne sont que dans des musées. Il y en a 300, et ça rend les gens fous de curiosité ! En même temps, cela n’a pas de prétention : ils sortent de l’exposition en se disant qu’ils peuvent eux aussi faire une robe en papier !

Hubert d’Ursel : Votre talent unique pour les robes en papier vous a amené à créer plusieurs collections, vous avez exposé dans beaucoup de musées à travers le monde. Quelle est la collection qui vous a apporté le plus de plaisir ?

Isabelle de Borchgrave : Une des plus belles est « Papiers à la Mode », ma première exposition, qui raconte 300 ans d’histoire de la mode, d’Elizabeth 1re à Coco Chanel. Il y eut ensuite « Les Médicis », où l’on se promène dans les rues de Florence, pour rencontrer d’illustres personnages dans leur tenue d’apparat. Ils ont fait de la Renaissance une période lumineuse : dorures, perles, soie, velours... Ces collections m’ont demandé énormément de recherches à travers le temps, c’était un immense travail.
Et puis il y a eu la ville de Venise qui m’a demandé de raconter l’artiste Fortuny (Mariano Fortuny y Madrazo, né en 1871, et mort à Venise en 1949, est un peintre, graveur, couturier et créateur de textile espagnol actif à Venise). C’était fou parce que je le considère comme mon père spirituel. La façon dont cet homme a travaillé les formes et la couleur, c’est tout ce que j’aime.

Cela a été un moment très important dans mes créations. Il y a eu aussi les « Ballets Russes », c’est la collection la plus contemporaine. J’y ai rendu un hommage à Serge de Diaghilev tout en célébrant le travail de Pablo Picasso, Léon Bakst, Henri Matisse, qui ont dessiné les costumes de ces ballets. Les robes sont suspendues, elles sont en mouvement, ça crée une atmosphère assez extraordinaire.

L’art, c’est la vie : tous les jours, il nous apporte du bonheur par ses formes et sa diversité.

Hubert d’Ursel : Vos plissés en papier font fureur, votre choix se porte aujourd’hui sur l’Afrique, le thème choisi pour l’exposition au Luxembourg. Comment fait-on un plissé qui reproduit des images si belles ?

Isabelle de Borchgrave : Je me suis inspirée de Fortuny pour les plissés, pour y joindre ensuite la peinture. Il y a un effet d’anamorphose fabuleux ! Ce qui m’intéresse, c’est de penser une image, l’élargir, de partir d’une peinture de 5 à 8 m de long pour ensuite la faire plisser. J’ai heureusement trouvé un atelier de plissage, cela marche bien la plupart du temps, mais parfois la machine s’emballe et déchire le papier.

Hubert d’Ursel : Enfin, vous vous êtes lancée il y a quelques années dans du mobilier en bronze, des tables peintes en églomisé et même des tapis avec la griffe Isabelle de Borchgrave. Votre énergie est intacte et votre créativité sans limites. Comment trouvez-vous le temps de réaliser tant de merveilles ?

Isabelle de Borchgrave : C’est mon entourage et mes amis qui sont enthousiastes, et c’est à grâce à eux que je tire mon énergie. L’un d’eux m’a dit un jour : j’aimerais une de tes oeuvres dans mon jardin, pourquoi pas en bronze ? Je suis donc partie avec une petite robe dans un atelier et sa fonderie. J’ai réussi à développer une nouvelle technique en utilisant des matières plus rigides pour pouvoir faire un plâtre, la base du futur bronze.J’avoue avoir un peu appris sur le tas dans la fonderie. Je suis étonnée et contente, car cela a beaucoup de succès. Mon futur projet est une bibliothèque, elle tourne dans ma tête, mais je ne l’ai pas encore concrétisée.

Hubert d’Ursel : Si c’était à refaire, que feriez-vous ?

Isabelle de Borchgrave : Exactement la même chose ! J’aurais quand même pris le temps pour étudier l’Histoire de l’Art. J’ai appris toute seule en autodidacte.
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