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Hausses des prix de l’énergie : croissance positive malgré tout

Jérôme van der Bruggen - Chief Investment Officer
Les prix élevés de l'énergie font la une des médias depuis quelques semaines. Quelle est en la cause et à quelle évolution peut-on s'attendre ?

La croissance est de retour et parfois même avec des taux « chinois ». Pourtant, depuis peu surgissent des doutes quant aux perspectives de croissance économique. Quelles en sont les causes et comment le voyez-vous évoluer davantage ?

  • Primo, la croissance du premier semestre est insoutenable. Ce semestre est le miroir du premier semestre 2020 – le moment où l’économie mondiale s’est littéralement arrêtée. 
  • Secundo, il y a les pénuries de composants liées aux ruptures d’approvisionnement dans les chaînes de production. Regardez, par exemple, les annonces faites par des constructeurs automobiles comme Stellantis. Ne sont-ils pas obligés de fermer temporairement certaines usines de production par manque de composants électroniques ? 
  • Tertio, il y a aussi des doutes sur la croissance chinoise
  • Et enfin, les prix de l'énergie sont en forte hausse. 
Autrement dit, les risques pour l'économie mondiale sont certainement là ! Cela étant dit, notre scénario de base est que la situation financière des ménages est suffisamment solide et les politiques soutenues suffisamment flexibles pour garantir que l'économie mondiale puisse surmonter ces défis.

Zoomons sur ces prix élevés de l'énergie qui font déjà la une des médias depuis quelques semaines. A quelle évolution peut-on s'attendre ?

Vous le remarquez déjà dans la facture d'électricité et surtout de gaz, même si les gouvernements prennent des mesures pour atténuer l'impact. Mais il n’y pas que les ménages qui sont concernés, les entreprises en ressentent également l'impact et certaines usines chimiques par exemple sont elles aussi mises à l’arrêt temporaire. Au niveau international, si le prix du pétrole a doublé par rapport à la même période l'an dernier, en revanche, le prix du gaz a quintuplé ! En fin de compte, il s'agit d'une inadéquation entre l'offre et la demande.
Si on examine la situation du gaz en Europe par exemple, on peut citer quatre raisons :
1.
La baisse de la production de gaz domestique (qui a diminué de pas moins de 30 % au cours des dix dernières années) ; 
2.
La transition énergétique. À long terme, nous devons nous débarrasser complètement des combustibles fossiles tout le monde est d'accord là-dessus. Mais durant cette transition, il y a encore beaucoup de demande de gaz... le gaz est l’énergie de transition par excellence. Et ce gaz, comme nous ne le produisons plus assez chez nous, il faut l’importer ;
3.
Une demande de gaz plus élevée de la part de la Chine qui elle opère sa propre transition énergétique et passe du charbon au gaz. Sur les marchés internationaux du gaz liquéfié, la Chine fait donc grimper les prix ;
4.
La Russie, dont nous importons – à travers un réseau complexe de pipelines – une partie du gaz que nous consommons et qui joue un jeu géopolitique compliqué. 

Des prix de l’énergie, ce n’est pas sans impact sur l’inflation ?

La réponse est nuancée. Nous aurons des prix probablement plus élevés qu'avant le Covid-19 mais probablement pas aussi élevés qu'aujourd'hui. Les investissements en source d’énergie vont augmenter et la Russie ouvrira probablement davantage le robinet gazier. Notez que les stocks de gaz ne sont pas à un niveau alarmant ; ils sont en mesure de couvrir cas l’équivalent du plus grand prélèvement de stocks effectué au cours des 10 dernières années. 
Nous considérons donc que le niveau actuel de prix du gaz est excessif. Cela devrait faire baisser le prix du gaz et atténuer les craintes inflationnistes de ce point de vue.

Maintenant, la question est de savoir si ces mouvements ont un impact sur la stratégie d’investissement adoptée dans les portefeuilles que vous gérez ? 

Nous avons décidé de prendre quelques profits. Les indices boursiers ont bien récupéré après le choc subi en 2020 et c’est le moment d’être disciplinés et d’élaguer certaines branches qui ont le plus bénéficié de la hausse. En bourse, on n’est jamais certains de rien et une gestion disciplinée fait partie de nos valeurs de gestion. Quitte à avoir vendu un peu trop tôt… 
Mais cela étant dit, notre scénario reste basé sur une croissance qui tient le coup malgré les remises en cause dont nous venons de parler. Nous tablons aussi sur des taux d’intérêt qui restent bas malgré le resserrement de la politique monétaire aux Etats-Unis. En d’autres mots, nous ne coupons pas l’arbre, nous l’élaguons afin qu’il puisse mieux repartir. 

Et sur un plan plus concret ?

Bien sûr, nos portefeuilles continuent d’être diversifiés.
  • Géographiquement, nous privilégions les Etats-Unis et l’Europe mais nous investissons aussi en Asie par exemple malgré le ralentissement de la Chine. 
  • Sur le plan sectoriel, nous prônons l’équilibre entre les valeurs avec de la croissance prévisible (technologie de l’information ou la consommation) et les valeurs cycliques. 
  • Bien entendu, nous avons aussi des obligations en portefeuille. Un peu moins qu’avant en raison de la faiblesse des taux mais nous pensons que les obligations devraient continuer d’absorber les chocs boursiers lorsque ceux-ci surgissent. 
  • Nous avons aussi des devises, en particulier du dollar qui peut s’avérer être un valeur refuge et qui d’ailleurs à tendance à s’apprécier légèrement lorsque la politique monétaire américaine se resserre. 
Je dirai pour conclure que « discipline et diversification » font partie des règles de gestion de base d’après nous.
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