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La voiture électrique: infrastructures et réglementations

Degroof Petercam - Marketing & Communication Specialist
Depuis l’introduction de la Ford T, il y a plus d’un siècle, le monde de l’automobile est entré dans sa plus grande révolution. La voiture électrique n’est pas une nouveauté, loin de là. En effet, le premier prototype aurait été inventé au XIXe siècle peu avant la voiture à combustion. Cependant, la supériorité technologique du moteur à combustion éclipsa le développement des voitures électriques jusqu’à aujourd’hui.
Les avantages de la voiture électrique sont nombreux : rendement énergétique supérieur, simplicité de production et de maintenance (moins de pièces en mouvement), performance du moteur, etc. Au-delà de ces avantages, la raison principale en faveur de la transition électrique concerne notre santé et l’environnement !

Un problème de santé publique

Les voitures à combustion émettent des gaz tels que du CO2 ou des oxydes d’azote (NOx) participant notamment au réchauffement climatique. S’il ne fallait retenir qu’un seul argument, l’émission de particules fines du moteur à combustion est suffisante pour justifier une transition vers l’électrique.
Qu’il s’agisse d’un moteur à diesel ou à essence, les gaz d’échappements contiennent d’importantes quantités de particules fines (particules dont la taille est inférieure à 2.5μm) dont l’effet nocif pour l’humain n’est plus à démontrer. Ces particules sont tellement fines qu’elles pénètrent en profondeur dans les poumons et entraînent des pathologies cardiovasculaires et respiratoires. En 2012, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a reconnu la dangerosité du diesel en le classifiant de « cancérigène certain pour l’homme », soit le niveau le plus élevé. L’essence est quant à elle toujours considérée, seulement, comme « cancérigène possible pour l’homme ». Toutefois, de nouvelles études montrent que le moteur à essence à injection directe (dernière technologie permettant de diminuer la consommation) émet autant, si pas plus de particules fines que le moteur diesel.

Plus vite que l’on ne croit !

Bien qu’il y ait peu de doute que la voiture électrique soit en train de s’imposer, l’adoption de celle-ci reste à ce jour faible (moins de 2 % des ventes). Sont en cause son coût élevé, sa faible autonomie et le manque de bornes de chargement public. Cependant, tout porte à croire que l’adoption de la voiture électrique va connaître une accélération significative ces prochaines années, au-delà même des prévisions les plus optimistes. Pour s’en convaincre, il faut analyser les trois principaux facteurs qui répondent aux craintes actuelles : l’infrastructure, les réglementations et les batteries.

Infrastructures : le besoin est surestimé

Le manque de chargeurs public est un argument fréquemment énoncé en défaveur des voitures électriques. Est-ce vraiment le paradoxe de l’œuf et de la poule ? Il faut tout d’abord s’intéresser aux différentes options pour charger un véhicule électrique. Il existe trois types de chargeurs : ultra-lent, lent et rapide.
1.
Les chargeurs ultra-lents sont ceux utilisés chez les privés dont la puissance du réseau électrique est limitée (quelques kW). Le chargement est effectué principalement durant la nuit. Il est estimé que 70-90% des besoins de chargements seront satisfaits par le chargement à la maison ou au travail. Ce qui ne laisse que 10-30% du besoin pour les chargeurs publics.
2.
Les chargeurs lents permettent de recharger une voiture en quelques heures (3-4h), ils sont les chargeurs les plus communs trouvés dans le public, souvent à proximité des commerces et des parkings. Il deviendra habituel de recharger sa voiture durant un restaurant ou cinéma.
3.
Enfin, les chargeurs rapides permettent de recharger en moins de 30 minutes et demandent une infrastructure particulière. La prochaine génération de chargeurs super-rapides, en cours de développement, permettra une recharge en moins de 10 minutes. Ce type de chargement rapide devrait être marginal et utilisé principalement pour des longs trajets comme un départ en vacances.
Le besoin des chargeurs publics est surestimé car ce ne sera pas l’option utilisée dans la majeure partie des cas. Il faut comprendre que charger sa voiture électrique est un tout autre paradigme que remplir son réservoir d’essence à la pompe. De plus, le réseau de chargeurs publics est déjà relativement important. On estime qu’il existe moins d’une dizaine de voitures électriques par chargeur public en Europe. Enfin, de nombreux acteurs investissent dans ce domaine avec comme exemple la Joint-Venture Ionity créé par VW, Ford, BMW et Daimler. Les compagnies pétrolières, les fournisseurs d’électricité et même des sociétés technologiques investissent dans ce marché.

Réglementations : le coup de pouce

Les réglementations sur l’émission de CO2 deviennent de plus en plus restrictives tant en Europe qu’au niveau mondial. Ces réglementations sont supposées être neutres quant à la propulsion utilisée mais en pratique, elles poussent les constructeurs automobiles à proposer des alternatives comme la voiture hybride ou électrique afin de ne pas dépasser les quotas de CO2 imposés.
Plus récemment, de nombreux gouvernements et des municipalités ont annoncé une interdiction pure et dure des voitures à combustion (en 2040 pour la France et le Royaume-Uni) ou ont émis des quotas sur les voitures électriques comme la Chine. Bien qu’il n’y ait actuellement aucune loi promulguée en ce sens, il s’agit d’un signal fort envers l’industrie de l’automobile et les usagers.
Enfin, le nombre de subsides pour l’achat d’une voiture électrique est en plein essor. La Norvège est un très bon exemple où des subsides allant jusqu’à 15.000 euros par véhicule peuvent être octroyées. La Corée du Sud, le Danemark et la Chine font également partie des bons élèves en la matière. Le but étant de stimuler la demande à court terme en compensant le différentiel de coût entre une voiture à combustion et électrique. Or, avec l’avancée de la technologie des batteries, ce différentiel diminue rapidement et les subsides peuvent être réduits progressivement. La mise en place des différentes réglementations et subsides est l’élément clé à court terme qui va accélérer l’adoption vers l’électrique. Ce mouvement est global avec la Chine comme figure de proue.

Batteries : vers une parité électrique/essence avant 2025

La batterie a un rôle prépondérant : jusqu’à 50 % du coût actuel du véhicule électrique est lié à sa batterie. En plus de son coût élevé, la batterie est un limitant pour l’autonomie. On est encore loin des 1000km d’autonomie actuel, mais est-ce vraiment indispensable d’avoir autant d’autonomie sachant que nous chargerons nos voitures électriques pendant nos activités ou la nuit ?
Depuis quelques années, le prix des batteries diminue de façon régulière, cependant pas assez pour concurrencer les voitures à combustion. Aujourd’hui, nous sommes à un point d’inflexion où cette diminution de prix va s’accélérer significativement, permettant une parité électrique/essence avant 2025. L’avancée technologique apportée aux batteries est en plein boom. Les cathodes enrichies en nickel sont actuellement en production et permettent d’accroître significativement la performance énergétique. Les prochaines évolutions, comme la batterie à l’état solide, sont en cours de développement et promettent des performances encore plus importantes.
Parallèlement à l’avancée technologique, la production de masse est bel et bien commencée. On parle beaucoup de la Tesla Gigafactory au Nevada qui produit actuellement la plus grande quantité de batteries au monde. Mais en réalité, il existe une dizaine de Gigafactory, sans compter les nombreux nouveaux projets. Dans ce jeu de production de masse, la Chine est le grand acteur avec une production mondiale estimée à plus de 60 % à partir de 2020. La production de batteries sera telle qu’elle pourra largement couvrir les besoins dans les prochaines années (suffisant pour supporter 10 % de pénétration en 2020). On peut même s’attendre à court terme à une surcapacité de production, ce qui devrait permettre de faire pression sur le prix des batteries. A moyen terme, par contre, le challenge sera de taille car la demande en batteries sera excédentaire par rapport à l’offre.
Les matières premières sont un enjeu capital dans la course à la production et ce notamment pour certains matériaux clés : le nickel, le cobalt et le cuivre. Contrairement à la croyance ordinaire, le lithium est moins important qu’il n’y paraît. La raison est simple, le lithium est abondant et relativement peu coûteux à extraire. A nouveau, la Chine se positionne comme l’acteur incontournable pour les matières premières. En effet, elle contrôle par l’intermédiaire de mines ou de raffinage, plus de 80 % de la production mondiale de cobalt (élément indispensable pour assurer la stabilité des batteries) alors que les réserves mondiales sont détenues à plus de 50 % par le Congo. Dans un premier temps, la dépendance aux matières première sera très forte car la demande de batteries sera en constante augmentation. Lorsque la production de batterie sera plus mature, le recyclage jouera un rôle primordial et deviendra économiquement viable de façon similaire à ce que l’on connaît aujourd’hui pour les batteries 12v au plomb (taux de recyclage proche de 100 %).

Quel impact ?

La révolution électrique est en train de bouleverser les acteurs du monde automobile. Les constructeurs traditionnels vont connaître une période de transition très compliquée car la profitabilité des voitures électriques est moindre. La chaîne de valeur se déplace de l’expertise du moteur à combustion, sur laquelle les constructeurs prennent des marges importantes, vers les batteries, la technologie embarquée et l’électronique qui ne sont pas intégrés chez les constructeurs traditionnels. Les futurs gagnants sont donc probablement à trouver parmi ces catégories d’acteurs ou parmi les nouveaux constructeurs ayant pu intégrer ces éléments clés (Tesla, BYD). La voiture hybride, combinant le mode de propulsion électrique et à combustion, risque de n’être que transitoire car cette solution est plus complexe et coûteuse qu’une voiture électrique. De plus, elle n’élimine pas le moteur à combustion et ses gaz toxiques.
Autrefois à la traîne sur le marché de l’automobile, la Chine est devenue incontournable et se positionne en leader de la transition électrique. Outre son avantage sur la production des batteries, le gouvernement chinois a mis en place une politique forte pour encourager l’adoption des voitures électriques. Une voiture électrique sur deux est actuellement vendue en Chine. L’Europe est sous pression et risque de le payer dans les années à venir si elle ne prend pas des mesures fortes.
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